miércoles, 16 de junio de 2010

"LE MERKOZYSME, UN MAUVAIS REMÈDE POUR L'UE"

16 juin 2010

 Angela Merkel et Nicolas Sarkozy sont parvenus à un accord sur la gouvernance économique européenne avant le conseil européen qui se réunira cette semaine. Simple compromis ou, comme l’affirme Nicolas Dupont-Aignan “capitulation en rase campagne”, l’histoire tranchera. Reste que l’accord retient la proposition d’Angela Merkel d’un pilotage économique élargi aux 27 et non restreint à l’Eurogroupe comme le souhaitait Paris. “Avec cet accord catastrophique, l’Union européenne confisque encore plus la démocratie, au risque de provoquer de violentes explosions sociales et populaires“, estime M. Dupont-Aignan. Une disposition prévoit en effet le retrait du droit de vote au conseil européen pour les pays laxistes en matière budgétaire.

L’intransigeance de la chancelière a contraint Nicolas Sarkozy à avaler son chapeau. Enfermée dans le dogme de la rigueur Angela Merkel apparaît une nouvelle fois plus en épicière à l’ancienne de l’Europe que, comme la dirigeante du pays le plus puissant du continent.

L’entente affichée des deux dirigeants qui survient après l’annulation en dernière minute de la précédente rencontre est un trompe l’œil destiné avant tout à rassurer les marchés. Les apparences sont sauves mais, rien n’est réglé. L’intransigeance sur les indicateurs économiques ne saurait constituer la feuille de route d’ une Union Européenne qui, à l’image d’une bicyclette, est condamnée à tomber si elle n’avance plus.

La position française était celle du bon sens : maintenir une avant-garde d’Etats, noyau dur de l’UE, susceptibles d’aller plus loin dans l’intégration. Dans le Figaro , Jacques Delors dans le rôle du vieux sage revient largement sur la panne européenne et regrette qu’ Angela Merkel refuse la coopération renforcée.Car c’est une évidence, il est plus facile de s’entendre à 16 qu’à 27. Au nom du principe de l’unité européenne, d’un traitement équivalent de l’ensemble des Etats, le diktat allemand conduit immanquablement à l’embourbement.

On ne dit pas non au chancelier de l’Allemagne” avait prévenu en son temps François Mitterrand. Le “oui” français n’est pas un cri du coeur. Outre la divergence économique, le compromis affiché masque une profonde divergence politique sur le mode de construction européenne. L’accord traduit surtout le marchandage entre une gouvernance économique élargie aux Vingt-Sept et une suspension du droit de vote des Etats déviants en échange d’une aide à la Grèce et du financement par la Banque centrale européenne (BCE) de la dette des Etats “cigales”.

La sanction exigée et obtenue par l’Allemagne à l’égard des Etats laxistes, la suspension du droit de vote en Conseil, apparaît totalement disproportionnée. Elle est surtout un terrible signal adressé aux peuples européens qui doutent déjà largement de la nature démocratique de la construction européenne.

En France, outre Debout la République, le PS a également formulé des critiques mais qui sous-estiment ce dernier aspect. Bruno Le Roux a ainsi déclaré : “Cette discussion entre la chancelière et le président de la République a marqué un accord de façade. Alors qu’il y a une monnaie unique, elle n’a pas marqué une volonté d’agir ensemble et d’avoir un sursaut politique“. Mercredi, les socialistes européens doivent présenter des contre-propositions pour sortir l’Europe de la crise qui devraient se limiter au champ économique.

Stefan Ulrich du quotidien Allemand Süddeutsche Zeitung va plus loin lorsqu’il évoque le couple franco-allemand : “Par une déclaration de principe commune, ils pourraient dissiper tous les doutes quant au sérieux de la France et à l’engagement européen de l’Allemagne. Ils pourraient soulever la question d’une armée européenne et celles de la défense du modèle social européen dans le monde, de la démocratie interne et des frontières de l’UE. Ils pourraient expliquer aux citoyens pourquoi ces derniers ont plus que jamais besoin de leur UE. Les deux parties devraient oublier leurs petites querelles. Nicolas Sarkozy, par le passé, a souvent sollicité Berlin et affirmé qu’il était prêt à entreprendre de grandes choses avec l’Allemagne. La chancelière est toujours restée sceptique. Pour une fois, elle devrait prendre Sarkozy au mot“.

Obnubilée par ses égoïsmes nationaux, l’Allemagne est perçue comme une locomotive en panne qui entretient des relations de défiance avec la France, non sans raison considérée comme une mauvaise gestionnaire. Pour le malheur de l’Europe, les deux pays ont à leur tête des dirigeants dénués de ligne politique claire au moment où, déboussolée par la mondialisation, le vieux continent se cherche des horizons et des architectes. Un mariage de la carpe et du lapin auquel le site Toute l’Europe.fr a déjà donné un nom, le Merkozysme.

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