Edito du Monde
Tous grecs ?
LE MONDE | 02.02.10 | 14h02 • Mis à jour le 02.02.10 | 14h02
e calendrier ne doit rien au hasard : au moment où Bruxelles place la Grèce sous surveillance, la France, par la voix de Christine Lagarde, sa ministre de l'économie, présente à la Commission européenne le plan du gouvernement pour ramener les déficits publics à 3 % en 2013. La ministre se gardera bien d'évoquer le mot de "rigueur", qui a failli lui coûter son poste peu de temps après son arrivée à Bercy en 2007, mais c'est bien de cela qu'il s'agit. Les propos du premier ministre dans Le Figaro (du 30 janvier) laissent peu de place au doute : "Nous sommes déterminés à faire des efforts sans précédent qui nécessitent une mobilisation nationale. Ce plan prévoit que les dépenses publiques globales progresseront à un rythme inférieur à 1 % par an dès 2011. Jamais un gouvernement n'aura fait autant. Concrètement, cela signifie un gel du budget des ministères, et des efforts comparables pour les collectivités locales."
Même démarche aux Etats-Unis : le déficit public, qui doit s'élever à 10,6 % du PIB cette année, devrait être ramené à environ 4 % en 2013. Dans les trois cas, Grèce, France, Etats-Unis (la liste n'est d'ailleurs pas exhaustive), la logique est la même : un an après avoir ouvert autant que possible les vannes du crédit pour conjurer la crise et rassurer l'opinion, les gouvernements commencent à entreprendre le mouvement inverse... également pour rassurer l'opinion. L'augmentation des taux d'épargne dans les pays occidentaux montre en effet que les ménages s'alarment désormais des déficits publics, qui, à leurs yeux, ont davantage servi à sauver les banques qu'à préserver leurs emplois. Il est donc temps pour les gouvernements d'envoyer le signal que l'on revient à une certaine normalité, même si le doute persiste. "La reprise est dans les statistiques, mais la récession est dans la vie de gens", a reconnu, à Davos, Larry Summers, le conseiller économique de Barack Obama. Les Etats eux-mêmes semblent piloter à vue : quoi qu'en dise Nicolas Sarkozy, annoncer dans la même foulée un grand emprunt et une conférence contre les déficits est peu cohérent. De même, il ne devrait pas être nécessaire de s'inquiéter des déficits de la Sécurité sociale si l'on est convaincu que le chômage va diminuer, comme l'a promis le chef de l'Etat.
La sortie de crise s'annonce politiquement et socialement délicate - les résurgences de populisme en témoignent. Là encore, la façon dont les Grecs vont accepter ou non la rigueur à venir va être observée de près dans de nombreuses capitales dont la politique emprunte, discrètement, une voie comparable.
Article paru dans l'édition du 03.02.10
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