Et si la gauche avait de l'audace ?
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Une semaine après sa victoire aux élections régionales, la "gauche solidaire", qui rassemble le Parti socialiste, Europe Ecologie et le Front de gauche, doit conjurer un double danger : l'illusion que la bataille présidentielle de 2012 est déjà gagnée, et les vieux démons de la division et de l'immobilisme.
Aussi nette soit-elle au regard des suffrages exprimés (54,11 %), la victoire de la gauche est, pour une part, en trompe-l'oeil. Le niveau élevé de l'abstention relativise le succès : la gauche a réuni 26,37 % des inscrits, soit 9 points de plus que la droite. Le bilan des présidents socialistes sortants a joué dans son quasi grand chelem régional, mais le vote du 21 mars traduit plus un rejet de la politique de Nicolas Sarkozy qu'une adhésion à un projet de la gauche qui, pour l'heure, n'existe pas.
Le PS semble gérer son triomphe avec modestie et responsabilité. Il ne veut pas refaire l'erreur de 2004 lorsque, sorti vainqueur d'un tiercé électoral - régionales, cantonales et européennes -, il avait imaginé que les portes de l'Elysée lui étaient déjà ouvertes en 2007. Avec l'autorité nouvelle que lui confère la victoire régionale, Martine Aubry a pressé son parti de ne pas se reposer sur ses lauriers. "Un espoir est venu, a-t-elle souligné, samedi 27 mars, devant le conseil national du PS, il est encore fragile. Rien n'est joué."
Il reste que, depuis le 21 mars, le jeu politique a été rebattu. A deux ans de la fin du mandat de M. Sarkozy, la droite est guettée par la sinistrose, tandis que la gauche a le vent en poupe. Selon un sondage Viavoice, publié lundi 29 mars dans Libération, 59 % des Français estiment que la gauche pourrait gagner la présidentielle si elle avait lieu aujourd'hui. Mieux, 52 % souhaitent cette victoire, et 53 % sont favorables à ce que le PS et Europe Ecologie aient un candidat commun.
Si la gauche veut pouvoir incarner durablement cet espoir, il lui faut se mettre rapidement en mouvement. La crise a mis à mal le capitalisme, mais elle a aussi secoué la vieille social-démocratie. Un nouveau modèle progressiste et écologique reste à inventer, de nouvelles alliances, à partir de la "gauche solidaire" des régionales, restent à imaginer. "Unis, nous pouvons beaucoup. Divisés, nous ne pouvons rien", a proclamé Mme Aubry.
Chaque parti est invité à revisiter ses "fondamentaux". Pour l'heure, le PS a évité de retomber dans la guerre des ego qui lui a fait tant de mal. Il va s'atteler à son projet, en espérant qu'il n'en sortira pas un catalogue fourre-tout mais de fortes priorités, et organiser ses primaires en 2011.
C'est là que les divisions peuvent ressurgir, d'autant que ses partenaires sont en pleine refondation. Les Verts préparent des assises de l'écologie politique à l'automne, mais rechignent à se dissoudre dans la "coopérative politique" de Daniel Cohn-Bendit et hésitent entre l'autonomie et l'alliance avec le PS. Le Parti communiste a perdu la moitié de ses élus et tente de résister aux ambitions du Parti de gauche de Jean-Luc Mélenchon. Pour se réinventer et offrir une alternative, la gauche doit d'abord faire preuve d'audace.
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